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Louis Emié
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27 novembre 2006

Petite biographie indispensable

Né le 17 avril 1900 à Bordeaux, rue de Bègles, Louis Emié fut très marqués par ses origines espagnoles qu’il tenait de sa mère. La famille rendait encore chaque été  Saint Sébastien chez l’oncle Manuel. Ainsi devait lui être révélée sa passion pour l’Espagne. Une passion qui ne cessera de s’épanouir au fil des années. Louis Emié était un homme du Sud.

Son enfance se déroula d’abord rue Eugène-Ténot, au numéro 40, où ses parents louèrent une échoppe avec un immense jardin de fleurs et de poiriers. Il s’inspira de ce cadre dans « Passage de la folie ». Sa mère insista pour qu’il appris très tôt le piano et on fit venir successivement deux maîtres de musique aveugles. L’enfant pris tellement goût à la musique qu’il rêva de devenir compositeur ou chef d’orchestre. L’un de ces deux professeurs l’initia à Debussy. Il aura à cœur, plus tard, de faire connaître aux Bordelais l’auteur de « Pelléas et Mélisande », ainsi que Satie et Stravinski.

En 1909, la famille se fixe au 5 de la rue Mestrézat. Louis, après une courte « expulsion », de 1937 à 1939 (il ne s’entendait plus avec son père), y habitat jusqu’à sa mort. Sa mère n’aimait guère cette demeure, car elle la croyait chargée de maléfices. La sœur et le frère de Louis y moururent. L’affection maternelle se reporta alors toute entière sur lui. Ce furent des liens si forts qu’il vécut toujours dans le souvenir de celle pour qui il composa les « plaintes ».

 

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Louis Emié travailla plus de quarante ans au journal « Sud-Ouest ». Son père l’avait destiné à une carrière de fonctionnaire municipal. Par chance, son oncle lui permis d’échapper à ses fonctions d’employé à la division des finances municipales en le faisant entrer au journal « La Petite Gironde » en 1925. Le métier lui plut et il ne regretta jamais les listes de chiffres de l’hôtel de Ville. Il devint secrétaire général adjoint à la rédaction. Dès lors il dut s’efforcer de dissocier son activité de journaliste de son activité d’écrivain.

Max Jacob, avec lequel il venait de se lier, le mit en garde contre la confusion des genres. Sans trop de souffrance, il sut faire la part entre son « gagne-pain » et son « gagne-ciel ». A partir de 1963, le journal lui proposa de tenir la première chronique de télévision. Le nombre de ses lecteurs s’accrut ainsi considérablement et il fut submergé de lettres d’admirateurs, ce qui l’amusait beaucoup.

Malgré le côté secret du personnage, voire sa marginalité, on peut cependant penser qu’il était, d’une certaine manière, plus intégré à la vie bordelaise que ne le fut son ami Raymond Guérin. Sa position de journaliste en faisait un personnage plus ouvert. Il fréquentait volontiers les manifestations artistiques de sa ville : expositions de peinture ou concerts au Grand-Théâtre. Il reçut de Bordeaux des honneurs que d’autres n’eurent pas la chance d’obtenir de leur vivant. On lui attribua notamment en 1958 le grand prix littéraire de la Ville.

Le 5 de la rue Mestrézat accueillait des gens passionnés par leur art, certains partageant la frêle sensibilité du poète. Ainsi recevait-il des écrivains : Jean Cocteau, Louis Guillaume, François Mauriac, Raymond Guérin… mais aussi des peintres et des sculpeurs : Mildred Bendall, Chaval, Joseph Rivière, des compositeurs, des chanteurs lyriques, des critiques d’art. Des amitiés qui comptaient beaucoup pour ce solitaire offrant parfois trop rapidement sa confiance. Un compagnon fidèle était cependant toujours présent à ses côtés : Golo, un énorme caniche noir, tendre chasseur de mouches.

En un certain sens, le repli feutré de la vie de province ne lui déplaisait pas. Il lui paraissait au contraire favorable à la création. Mais si la Province est un terrain propice à l’imagination, elle père cependant sur la renommée. Très vite il comprit qu’il devrait sa survie à la correspondance et aux voyages. La correspondance pour le plaisir de partager ses émotions littéraires et rompre l’isolement. Trois auteurs dans cette correspondance paraissent avoir exercé une influence déterminante sur son cheminement intellectuel. : Max Jacob, Jean Cocteau et Joël Bousquet. A partir des lettres échangées avec Max Jacob, il bâtira « Dialogues avec Max Jacob », ouvrage aux résonances rilkéennes.

Grâce à ce rituel épistolaires, Louis Emié était relié à la capitale, aux milieux éditoriaux et littéraires. Il entre chez Gallimard en 1929 avec son roman « La nuit d’Octobre ». En 1944, il obtient le prix du Panthéon pour son recueil de poèmes « Le nom du feu », en 1946 le prix Moréas pour « L’Etat de grâce », et en 1960 il fut lauréat de l’Académie française pour l’ensemble de son œuvre poétique.

Une participation régulière à des revues littéraires l’aida également à se faire connaître. Dès les années vingt, il collabora aux « cahiers du Sud », signa des chroniques et fit paraître des poèmes à la N.R.F.

Encouragé, il le fut par exemple par Jean Ballard qui l’incita à écrire sur ses voyages en Espagne. Ces très belles pages devaient donner le livre « Espagnes », peut être les plus belles jamais écrites sur ce pays, les plus justes, qui traduisent « tout le suc, toute la substance, toute la chair de l’Espagne mystique, torturée, accidentelle et permanente. ».

Sans doute est-ce par ce livre qu’il faudrait commencer une lecture de l’œuvre de Louis Emié. Il y révèle les clefs de sa poésie, douloureuse, chaude et noire.

 

 

D’après l’article de Françoise Taliano parut dans Sud Ouest le 1er septembre 1985.

 

 

 

 

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